Martineau
Floran
Toulouse. Fenêtre sur Dôme. 2016.
Projet Urbain:
Le site de l’hôpital de La Grave ne propose aujourd’hui qu’un nombre réduit de services médicaux. La plupart des édifices présents sont désaffectés. En raison de sa forte valeur patrimoniale, nous avons eu la charge, par groupe de cinq, de requalifier le site dans le cadre notre PFE au sein de l’Atelier Patrimoine dirigé par Françoise Blanc. Nous avons divisé le site en quatre zones afin de mener à bien notre intervention. La première zone est le bâtiment même de l’hôpital de La Grave. Constituant un édifice à l’échelle de la ville de Toulouse, nous le restaurons et, ne pouvant plus accueillir d’usage médicaux de par sa non-conformité, proposons d’en faire un centre de congrès pour les médecins et les architectes. La seconde zone est matérialisée par l’archipel d’édifices anciens au Sud du site. A l’aide d’un maillage, nous restructurons cette zone et en faisons un nouvel espace d’habitations et de commerces au sein du quartier Saint Cyprien. Cette intervention implique la démolition du centre Claudius Regaud. La troisième zone est le « vide » situé entre les précédentes zones. Formant aujourd’hui un parking à ciel ouvert, nous en faisons un parc en conservant le mail de tilleuls existant. Le parc est le cœur de notre projet urbain. La dernière zone est celle de l’escoussière qui longe l’un des derniers fragments du rempart datant du Moyen Age. L’escoussière relie les trois premières zones. Autrefois à usage de service, nous nous en servons afin de créer un cheminement touristique.

Projet architectural :
Dans une société où nous sommes de plus en plus amenés à travailler à notre domicile, la question de l’habitat est primordiale. J’ai pu approfondir les réflexions autour de la question du logement au cours de mes études et il était logique pour moi d’en faire le sujet de mon PFE. Je me suis donc occupé d’approfondir l’élaboration des îlots de logements, bordant le parc constituant le cœur de notre projet urbain, situé dans la seconde zone.
Interprétation personnelle du site :
Le site de La Grave est chargé d’histoire. Au cours de la Renaissance, ce lieu a connu une restructuration ordonnée et rythmée propre au style classique de l’époque. C’est à partir de ces singularités que j’ai pu définir le concept du projet de logements. En effet, le rythme classique est lié à la répétition qu’Auguste Choisy, dans son ouvrage « Histoire de l’architecture », définit comme « le moyen le plus puissant dont dispose l’architecte » lorsqu’il fait référence aux enfilades de colonnes égyptiennes et aux rangées de Sphinx. Une interprétation possible de cette citation est que de par sa sobriété, la répétition permet de mettre en place un socle architectural solide et sans travers. Les écrits de Pierre Sansot m’ont permis d’approfondir cette idée. Dans son ouvrage « Jardin public » il écrit que la sobriété est essentielle car elle permet de stimuler l’imaginaire de chacun. Afin d’expliciter ces propos, Pierre Sansot site un contre-exemple, celui des parcs d’attractions et de leurs équipements « Disney Land ». Ces infrastructures sont élaborées suivant une telle excentricité qu’elles soumettent à un imaginaire bien précis et rende impossible « l’imaginaire le plus noble qui nécessite une création, ou une recréation ». Cette imaginaire « noble », « témoigne de notre don de transfiguration, rendu inutile lorsque d’autres hommes ont pris en charge cet étrange pouvoir. » Ainsi la répétition pose les bases d’une architecture assumée et sur laquelle chacun de nous peut projeter ses rêves les plus fous. C’est en gardant toujours en tête cette idée que j’ai pu réinterpréter les lignes architecturales du passé et donner forme au projet. Voici les trois principaux concepts m’ayant guidé dans cette réappropriation :
-réinterprétation de l’îlot fermé sur cour que l’on retrouve au sein de l’hôpital de La Grave mais également dans l’ensemble du centre ancien de Toulouse. Dans le projet, je réutilise l’îlot fermé et je l’ouvre du côté du parc de manière à créer une limite poreuse entre l’espace végétal constituant le cœur du projet urbain et le quartier de Saint Cyprien.
-réinterprétation des arcades qui, dans l’hôpital de La Grave, clôture les cours fermées. Dans le projet, les arcades bordent les îlots de logements et créent une échelle intermédiaire entre les bâtiments de logements que je mets en place et le contexte.
-réinterprétation des toitures à double pente qui sont ici inversées afin de créer un contraste révélant l’archétype de l’édifice traditionnel.












Projet personnel :
Le maillage que nous avons mis en place dans le cadre du projet urbain a formé une succession d’îlots au sud du parc. Je redécoupe ces parcelles de manière à créer les îlots ouverts sur le parc.
J’obtiens une succession de cours et de rues permettant le stationnement en dépose minute. Les cours, destinées aux habitants des îlots, permettent aux commerces et aux ateliers situés en rez-de-chaussée de communiquer visuellement. Nous trouvons également en rez-de-chaussée, un cinéma dont est dépourvu aujourd’hui le quartier de Saint Cyprien. L’une des façades de cet équipement intègre les arcades d’un édifice du 19ème siècle présent sur le site.
Aux deux premiers étages des îlots nous trouvons un système de logements appropriables. Une structure dotée de son réseau de fluides permet de passer très facilement du T2 au T5 et de créer une grande diversité de logements. Cette idée de logements appropriables se retrouve dans les nouvelles opérations de la banlieue de Toulouse et le concept fut à la base développé dans les quartiers pauvres du Chili par l’agence Elemental dirigée par Alejandro Aravena. Ainsi, l’introduction de ce concept dans l’élaboration de logements de centre-ville destinés à une population aisée est apparue comme une idée innovante.










Au troisième étage, nous trouvons une maison sur toit disposant d’une large terrasse donnant sur le parc. La double pente inversée a permis d’un côté de doter cette maison sur toit d’un faux plafond qui, associé à un puit de lumière zénithal, permet de guider le visiteur dans ce logement particulièrement long. Depuis l’entrée, le puit de lumière forme un appel et oriente vers le salon. Puis la courbe du fond plafond accompagne vers la terrasse. De l’autre côté, la pente inversée permet de créer une mezzanine et d’obtenir deux chambres supplémentaires.





Le fil conducteur ayant permis l’élaboration de ces logements est un travail sur le rapport entre dehors et dedans. En effet, des biais permettent de cadrer des orientations et font bénéficier tous les logements d’une vue sur le parc et sur le dôme de La Grave. De plus, tous las appartements sont dotés d’une baie vitrée donnant sur une terrasse ou un balcon. En outre, un système de claustra et un travail sur la végétation permettent de gérer les vis-à-vis et de garantir l’intimité des habitants.
Matérialité :
La sévérité du béton structure le projet et permet de poser le système basé sur la répétition. Son contraste avec la brique, utilisée pour édifier l’ensemble des autres bâtiments présents sur le site, permet de révéler cette dernière. Plus précisément, le béton forme les arcades bordant les îlots ouverts et constituant un socle au projet. De plus, il matérialise la base structurelle des logements appropriables. Pour finir, le béton est utilisé pour bâtir les façades sur parc afin de leur donner une présence à l’échelle du « vide » qu’elle borde.
La variété de la brique est ici utilisée pour exprimer la flexibilité, la souplesse des bâtiments. Elle est utilisée en parement pour habiller la maison sur toit et la lier aux logements situés en dessous. J’ai choisi de marquer ce dispositif de parement d’un joint horizontal épais et d’un joint vertical peu marqué afin de respecter les codes contemporains de la brique. En outre, associée à des lames de métal, la brique matérialise les claustras qui se veulent en apparence modernes et les plus légers possible. Les lames de métal sont placées à l’horizontale et soulignent le joint horizontal de la brique. En utilisant la terre cuite, je fais éco à la brique foraine utilisée sur le site et je montre que ce matériau ne cesse d’être réinventé. Ce dernier s’inscrit aujourd’hui dans un raisonnement architectural privilégiant le souci du détail (le calepinage, le travail sur le joint, etc…)
La souplesse du bois est utilisée de manière exceptionnelle à l’intérieur des habitations afin de créer des espaces agréables et privilégiés. Le bois matérialise le faux plafond des maisons sur toit et certaines menuiseries.



Bord poreux du parc
Rythme classique
Entrées équipements privés
Façade Sud-Est
Réinterprétation îlot fermé sur cour
Réinterprétation cour classique
Réinterprétation toiture traditionnelle
Plan Rez-de-chaussée
Flexibilité/Appropriation
Strucutre
Ordre/Chaos

Liteau
Contre liteau
Zinc
Isolant
OSB
Chevron bois
Panne béton
Brique
Lame d'air
Split
Portant métallique
Faux plafond bois
Encadrement bois
Conclusion :
Le projet est fondé sur un système répétitif et ordonné, inspiré des lignes architecturales de l’hôpital de La Grave. Ce système m’a permis de gérer des implantations dans des parcelles irrégulières et de permettre la mise en place de lignes architecturales contemporaines libres. L’idée « d’ordre et de chaos » qu’expose Robert Venturi dans son ouvrage « De l’ambiguïté en architecture », en s’appuyant sur les réalisations de Le Corbusier ou d’Alvar Aalto, prend ici tout son sens : « L’ordre doit exister pour qu’on puisse le briser. »